REVUE DE PRESSE NORMANDE au 4 août 2023: décès de l'écrivain normand Gilles Perrault

4 août 2023

Revue de presse normande au 4 août 2023:

Nous avons la tristesse d'apprendre ce jour la disparition dans la nuit du 2 au 3 août 2023 du journaliste et écrivain normand Gilles Perrault, mort de sa belle mort- il avait 92 ans- dans sa maison de Sainte-Marie-du-Mont, sur cette côte si secrète et préservée du Cotentin oriental...

Jacques Peyroles, Gilles Perrault de son nom de plume, était un brave chevalier normand parti en croisade contre l'injustice et l'arbitraire.

Cet ancien militaire parachutiste, avocat militant communiste, devenu journaliste et écrivain épris de justice, fut l'une des dernières incarnations les plus flamboyantes du grand écrivain intellectuel à la française issue de la fameuse affaire Dreyfus sur le modèle de Voltaire parti plusieurs fois en croisade contre les injustices institutionnelles et l'arbitraire ou les erreurs judiciaires.

Cette figure d'écrivain engagé qui cherche à rétablir la vérité et la justice a fasciné des générations entières de journalistes ou d'hommes et de femmes publiques notamment à gauche. Gilles Perrault, à l'instar d'un autre grand phare lui aussi désormais éteint de la conscience journalistique française- nous pensons évidemment à Pierre Péan- était très exigeant avec lui-même, rigoureux dans la tenue de sa parole publique et ses engagements politiques même s'il connut certains aveuglements idéologiques propres à l'époque de sa jeunesse sur la question semble-t-il toujours taboue à gauche de la légitimité du recours à la violence parfois la plus radicale pour mener un combat militant d'idées.

Aussi, compte tenu de la grande réserve du personnage, il n'est pas certain qu'il aurait apprécié les hommages parfois bruyants de certains tels que Edwy Plenel qui n'est qu'un simple sycophante se parant des plumes du paon de l'intellectuel dreyfusard!

L'écrivain Gilles Perrault, auteur du "Pull-over rouge", s'est éteint à 92 ans (francebleu.fr)

L'écrivain Gilles Perrault, auteur du "Pull-over rouge", s'est éteint à 92 ans

Gilles Perrault, qui s'était engagé en faveur de l'abolition de la peine de mort dans son livre "Le Pull-over rouge", est décédé à 92 ans, a-t-on appris ce jeudi 3 août 2023.

L'écrivain Gilles Perrault, qui avait beaucoup pesé dans les années 1970 en faveur de l'abolition de la peine de mort en publiant "Le Pull-over rouge", s'est éteint à 92 ans, a appris l'AFP jeudi auprès de sa famille. L'auteur est décédé dans la nuit de mercredi à jeudi d'un arrêt cardiaque, confirmant une information de Ouest-France.

Jacques Peyroles, de son vrai nom, avait débuté une carrière d'avocat avant de bifurquer vers le journalisme puis la littérature. Sous son pseudonyme, il signe notamment en 1969 un roman d'espionnage à succès, "Le Dossier 51", adapté en film avec Michel Deville. Il n'était "pas seulement un formidable raconteur. Mais aussi un homme engagé", a salué jeudi soir le journaliste Edwy Plenel dans un message sur Twitter.

Le nom de cet ancien adhérent au parti communiste revient dans de nombreuses tribunes engagées contre le racisme, pour la légalisation de l'euthanasie, ou en 2007 en faveur de l'ex-activiste italien Cesare Battisti. "Avec sa plume de combat, Gilles Perrault a permis d'avancer vers l'abolition de la peine de mort. L'humanisme a aussi guidé son engagement à Ras l'front", un réseau associatif actif dans les années 90 pour lutter contre les idées du Front national, a souligné la ministre de la culture Rima Abdul Malak.

En 1978, la parution du livre-enquête "Le Pull-over rouge", qui alimente les doutes sur la culpabilité de Christian Ranucci, guillotiné deux ans plus tôt pour le meurtre d'une petite fille, va donner lieu à une vive polémique, alimentant les pages des journaux pendant plus de trente ans. Des livres ultérieurs sur l'affaire, et ses propos répétés à son sujet (il avait qualifié l'enquête sur le meurtre de la petite Marie-Dolores Rambla de "forfaiture"), conduiront à sa condamnation, notamment pour diffamation envers des policiers de la brigade criminelle de Marseille.

La peine de mort est abolie en France en 1981, mais les trois demandes de révision du procès n'ont jamais abouti.
"Une recherche de révision, ça n'est pas du sprint, c'est du marathon", avait déclaré l'écrivain à l'AFP en 2006, espérant toujours voir un jour l'affaire réexaminée.

"Il est des auteurs et des oeuvres qui savent susciter le débat, et parfois même des vocations. Si je devins avocate, c'est en partie grâce au Pull-over rouge", a réagi jeudi la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet.

En 1990, Gilles Perrault avait été à l'origine de l'une des plus graves crises de l'histoire des relations franco-marocaines en publiant le retentissant "Notre ami le roi", qui faisait un bilan accablant de 30 ans du règne d'Hassan II.

"Les livres de Gilles Perrault sont des marqueurs pour ma génération. Il y a un avant et un après Notre ami le roi dans le regard sur le Maroc d'Hassan II", a appuyé Pierre Haski, journaliste et président de Reporters sans Frontières.

L'ouvrage s'interrogeait aussi sur la complaisance de certaines élites françaises à l'égard du monarque.
Perrault avait préfacé en 2014 un livre très critique à l'égard du roi actuel du Maroc, fils d'Hassan II, écrit par un ancien journaliste marocain de l'AFP Omar Brouksy. Intitulé "Mohammed VI derrière les masques", il était sous-titré "le fils de notre ami", en référence à son célèbre ouvrage.

L'article de Ouest-France à lire ci-après revient un peu plus sur l'enracinement de Gilles Perrault dans son Cotentin normand à Sainte-Marie-du-Mont: l'écrivain venu de Paris a, semble-t-il, beaucoup apprécié la discrétion et la dignité mêlées de force de caractère des Normands du cru...

Décès de Gilles Perrault : la Manche avait mis l’écrivain dans sa poche (ouest-france.fr)

Décès de Gilles Perrault : la Manche avait mis l’écrivain dans sa poche

Une vie enracinée à Sainte-Marie-du-Mont, une œuvre engagée : l’écrivain Gilles Perrault, décédé dans la nuit du mercredi 2 au jeudi 3 août 2023, était «un homme délicieux».

La nuit dernière, le grand cœur de Gilles Perrault, usé depuis peu, l’a lâché. L’écrivain avait 92 ans.

En 2013, notre confrère François Simon livrait de lui un beau portrait, à l’occasion de la diffusion, sur France 3, d’un non moins beau documentaire de Thierry Durand, L’écriture comme une arme. Une présentation sensible et fouillée du citoyen de Sainte-Marie-du-Mont, dans la Manche.

Un jour de mai 1961

Gilles Perrault avait débarqué là par surprise, un jour de mai 1961, raconte François Simon. À l’époque, celui qui s’appelle encore Jacques Peyrolles est « mal dans sa peau ». Avocat en rupture de barreau, mari en déchirure de couple, ancien parachutiste qui vient de sauter dans le vide. Il a un bouquin à réussir. Une vie à se réinventer. Il achète une maison, s’installe sur une petite table au premier étage où il rédige à la main.

Au village, personne ne lui pose de questions, ni ne lui conteste d’être lui. Les gens d’ici sont comme le climat, violemment modérés, extrêmement tempérés. Il sera « l’écrivain ». C’est-à-dire un voisin.

Don Quichotte (de la Manche) (sic!)

Perrault n’était pas comme ces Parisiens qui viennent s’ensauvager et repartent à la première tempête. Non, lui, c’était sérieux et durable : « J’ai été président du syndicat d’initiative, du tennis-club, conseiller municipal et secrétaire trésorier du corps des sapeurs pompiers » dit-il à la caméra de Durand, cet homme toujours attentif et charmant. Civilisé. Délicieux.

Il était aussi le justicier Perrault, le Don Quichotte (de la Manche) qui rompt les lances, le chien de chasse se meurtrissant la truffe dans la vilenie du monde, l’entêté du Bien qui ne lâche jamais. En clair, le Perrault du Pull-over rouge (centré sur le condamné à mort Christian Ranucci) de Notre ami le Roi (sur Hassan II du Maroc), de L’Orchestre rouge (du nom du plus impressionnant réseau de renseignement de la Seconde Guerre mondiale.)

De ces pavés dans la mare, il affirmait qu’ils lui étaient venus sans qu’il aille les chercher. Sans doute. Mais, l’adresse était bonne et le client sérieux.

Gilles Perrault était un homme dans son siècle, militant « pacifique mais pas pacifiste », féru d’Histoire, nourri de littérature américaine, lecteur fidèle du Monde et de La Presse de la Manche, préférant « penser à Sainte-Marie-du-Mont qu’à Saint-Germain-des-Prés » et rédigeant pour plus tard sa propre épitaphe : « Il a fait ce qu’il a pu ».

Une dernière image

« En le voyant se promener sur un chemin au bras de sa Thérèse, on le prenait sans ciller pour un « Gilles d’ici ». Il est des nôtres définitivement », concluait François Simon à la fin de son article…

Commentaire de Florestan:

L'un des tous derniers combats du chevalier Perrault fut de se battre avec la dernière énergie pour que dans le cadre de l'actuelle folie furieuse de la fusion de nos communes, celle de Sainte-Marie-du-Mont puisse garder son nom historique définitivement lié à la grande Histoire à l'occasion du débarquement de juin 1944 sur la plage de la commune, "Utah Beach". Ce dernier combat fut le bon puisque Sainte-Marie-du-Mont (dédié à la Vierge Marie comme son nom l'indique) ne s'appelera jamais... "Montmerville" suite au référendum local organisé à la demande insistante de Gilles Perrault.

Perrault avocat de Sainte-Marie-du-Mont (ouest-france.fr)

Journalisme en vacances: l'étrange hiérarchie de l'information présentée ce jour sur le site de Paris-Normandie (capture d'écran en date du 4 août 2023):