Desserte territoriale du port du Havre : quand un correspondant de Caen en parle...
Un commentateur parmi d'autres des articles de Sire de Sei, que votre serviteur connaît personnellement, lui a signalé un article publié par un correspondant du journal Les Echos à Caen, relatif à la desserte territoriale du port du Havre et ses perspectives d'amélioration, par voies fluviale et ferroviaire. Voici une transposition dudit article :
Le rail et le fluvial, « talon d’Achille » tenace du port du Havre
Les Echos 3-4 avril 2023
Transports – Philippe Legueltel – correspondant à Caen
Quelques 85 % des millions de conteneurs du port transitent encore par la route.
Haropa Port cherche à favoriser la multimodalité, devenue un enjeu environnemental fort.
Premier port français à l'exportation, Le Havre accueille un millier d'entreprises sur 10 000 hectares. (Petit Francis/Abaca Via Reuters)
Il a été officiellement lancé en 2017. Mais le projet de chatière du port du Havre, très attendu par certains et vivement contesté par d’autres, va encore prendre du retard. Il y a quelques jours, un recours a été déposé contre la construction de cet aménagement destiné à faciliter l’accès des péniches aux terminaux à conteneurs de Port 2000, la partie la plus récente du port destinée aux grosses cargaisons. La chatière est la solution choisie par le port du Havre et sa structure gestionnaire, Haropa Port (née du regroupement des ports du Havre, de Rouen et de Paris en 2021), pour développer et optimiser le transport fluvial de marchandises via la Seine.
Le projet consiste en la création d’une digue de deux kilomètres, permettant de relier le port historique aux quais de Port 2000. Il offrira un chenal de navigation protégé des courants pour une flotte fluviale dont 90 % des bateaux ne peuvent accéder au port en eau profonde. « C’est la pire solution, la plus dégradante et la plus dommageable pour le milieu marin. La chatière entraînera trois millions de mètres cubes de sédiments à draguer », protestent le Comité régional des pêches de Normandie et les associations de protection de l’environnement, qui viennent d’attaquer en justice l’arrêté préfectoral de juin 2023 autorisant sa construction. Les travaux devaient démarrer dans les prochaines semaines pour une durée de deux ans.
Commentaire :
Les pêcheurs ont une légitimité évidente pour exprimer une opposition au projet. Cela dit, pour récolter les coquilles Saint Jacques, ils draguent le fond marin... Ne s'agit-il pas là d'une dégradation du fond marin ?
Quant aux protecteurs de l'environnement, ils sont a priori opposés à toute infrastructure... Sauf peut-être des éoliennes... Et encore pas n'importe où, pas de grande taille... Pas si elles assomment des oiseaux... Pas si elles sont visibles... etc...
« On peut clairement faire mieux »
« Cette connexion directe est attendue par les professionnels depuis des décennies. Cet investissement est nécessaire pour que le Havre garde son statut de port de premier ordre », plaide Hervé Morin, le président centriste de la Région Normandie, favorable à ce plan d’eau abrité d’un montant de 125 millions d’euros (financé aux deux tiers par la région). L’enjeu est de taille pour le premier port français à l’export, qui accueille un millier d’entreprises sur 10 000 hectares et qui, dans son projet stratégique 2020-2025, place la multimodalité au cœur de son développement. Plus de 2,5 millions de conteneurs (soit 40 % du trafic, le reste étant composé d’hydrocarbures et produits dérivés) doivent transiter par Le Havre cette année, contre 3 millions en 2022.
Commentaire :
Ne serait-il pas fait allusion à une baisse prévue du trafic maritime de conteneurs du port du Havre entre 2022 et 2023 ? Mais pourquoi donc cette baisse prévue ?! Ah oui, je me souviens, c'est un effet collatéral des sanctions prises pour mettre l'économie de la Russie à genoux...
Sur les dix dernières années en moyenne, 85 % des conteneurs qui arrivent ou partent du Havre transitent par la route, mais seulement 10 % par le fleuve et 5 % par le rail. « C’est notre talon d’Achille. On peut clairement faire mieux et la multimodalité représente un gros enjeu pour nous, à la fois fluvial et ferroviaire », concède Florian Weyer, directeur général délégué d’Haropa Port, en charge de la direction territoriale du Havre.
Améliorer la connexion ferroviaire
Même si la route garde un avantage compétitif, près de 4000 trains de marchandises circulent chaque année depuis le Havre. D’autres ports européens font mieux, comme Hambourg, en Allemagne, qui atteint les 50 % de conteneurs sur rails.
Commentaire :
..."depuis"... : Je suppose que l'auteur de l'article a voulu dire "entre Le Havre et l'intérieur du territoire"...
4000 trains par an, cela fait en moyenne 11 trains par jour, environ 1 train toutes les deux heures ; information plausible, trafic a priori compatible avec le trafic de trains de voyageurs sur le même axe ferroviaire...
Confirmation en base année 2018 (Source : https://latitude-cartagene.com/wp-content/uploads/2019/03/atlas-cartographique-sncf-trafic-fret-latitude-cartagene-pw.pdf)
En 2018, depuis et vers Le Havre, on relève 12 trains de fret par jour, entre Rouen et Paris, 13, et en Basse Normandie, depuis et vers Cherbourg, 3.
Coûts, disponibilités, fréquences : les handicaps français rencontrés par les chargeurs sont nombreux : « Dans une première étape, nous avons engagé 15 millions d’euros à l’automne 2022 pour disposer d’un réseau ferré portuaire efficace, créer et former plus de trains. Une première tranche d’études pour remettre à jour les besoins des entreprises, et de travaux, pour améliorer la connexion ferroviaire de nos terminaux, va commencer sur notre réseau », plaide Florian Weyer.
Clairement affichée - la multimodalité est devenue un enjeu environnemental fort -, la volonté d’Haropa Port est de passer à 12 % la part du fluvial et à 8 % celle du rail d’ici deux ans. L’objectif, sur la période 2025-2030, est de tripler le volume transporté, en passant de 75 000 à 225 000 conteneurs mis sur les trains, et d’atteindre les 1600 trains par an. Pour séduire davantage les industriels et logisticiens de la zone portuaire, SNCF Réseau et Haropa Port ont justement décidé, en juin dernier, d’unir leurs efforts afin d’améliorer la performance ferroviaire. « L’augmentation du report du transport terrestre de marchandises vers les modes dits massifiés (fluvial et ferroviaire) est un enjeu de développement majeur sur le plan économique, écologique et sociétal », indiquent les deux structures.
Commentaire :
Problème : s'il faut, selon une information figurant au cinquième paragraphe, 4000 trains pour acheminer 75 000 conteneurs, il en faudrait, proportionnellement... 12 000 pour acheminer 225 000 conteneurs ! Et non pas 1600 (coquille ?). Soit en moyenne 33 trains par jour, environ entre 1 et 2 par heure. Trafic a priori compatible avec le trafic de trains de voyageurs sur le même axe ferroviaire...
Une équation compliquée à résoudre
Sans attendre, Naviland Cargo, filiale de la SNCF qui a repris à l’été 2022 l’exploitation du terminal de Tours (Saint-Pierre-des-Corps), investit sur le réseau havrais dans la régénération de trois voies existantes (d’environ 200 mètres chacune). « A la demande de plusieurs clients, nous proposons, depuis le 1er août, trois allers-retours par semaine entre Le Havre et Tours puis Bordeaux », explique Laurence Loisel, directrice adjointe du centre national des opérations de la compagnie.
L’équation est d’autant plus compliquée qu’une nouvelle dynamique de projets est en route le long de la Seine et sur les quais du port du Havre. Sur ce dernier, le plus important émane de l’armateur italo-suisse MSC, numéro un mondial pour la capacité de transport de conteneurs. En juillet 2022, sa filiale portuaire Terminal Investment Limited a annoncé un investissement de près d’un milliard dans les portiques et outillages sur Port 2000. Sans report modal performant, le risque est donc, pour Le Havre, de crouler d’ici peu sous les camions.
Commentaire conclusif :
A l'horizon 2030, il est donc envisagé de faire circuler sur un axe à deux voies partagé avec des trains de voyageurs interrégionaux, dont des Paris-Le Havre, en moyenne 33 trains transportant des conteneurs par jour + d'autres trains transportant des marchandises non conteneurisées.
Il vaudra mieux, plus que jamais, qu'il ne se produise alors aucun incident susceptible de paralyser le trafic pendant plusieurs jours, semaines, mois... Parce qu'entre Le Havre et Motteville, on ne trouve pas de voie ferrée parallèle de substitution...
Sapeur de fond s/c Florestan
Commentaire de Florestan:
Raison de plus de penser sérieusement à l'idée d'un désenclavement ferroviaire du premier port français par la rive Sud de l'estuaire de la Seine afin de consolider ce qui reste encore de l'hinterland français d'un grand port normand...