Billet de Florestan:

Il y a une semaine, on apprenait que le président Macron avait reçu François Hollande à déjeuner à l'Elysée pour évoquer avec lui de grandes réformes institutionnelles. Parmi celles-ci, remettre sur le chantier la carte des régions de France avec une nouvelle étape de la décentralisation...

 Le site "20 Minutes" s'en est souvenu aussi et propose depuis peu à ses lecteurs deux questions impertinentes sur l'avenir des grandes régions issues de la réforme Hollande-Valls des années 2014-2016:

https://www.20minutes.fr/societe/4022817-20230210-occitanie-redecoupee-deux-regions-pensez-quoi

L’Occitanie redécoupée en deux régions, vous en pensez quoi ?

Vous témoignez Le Président Macron souhaiterait, dans le cadre d’une future réforme institutionnelle, revenir sur le découpage des grandes régions, de l’Occitanie notamment. Vous approuvez, ou pas ? Et pourquoi ?

Faut-il faire rétrécir la grande région Occitanie ? Une indiscrétion, qui sent le ballon d’essai, rapportée par La Dépêche du Midi, prête à Emmanuel Macron l’intention, dans le cadre d’une prochaine réforme institutionnelle, de revenir sur le découpage décidé par son prédécesseur François Hollande. L’Occitanie, deuxième plus grande région de France métropolitaine, née il y a sept ans de la fusion en Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon, serait concernée, tout comme la Nouvelle-Aquitaine, la région Grand-Est et Auvergne-Rhône-Alpes (ARA).

Alors, que vous inspire cette perspective ? Vous sentez-vous désormais Occitan ? Quels avantages verriez-vous à revenir aux « frontières » d’avant 2016, et quels inconvénients ? Ou bien, ce débat vous laisse totalement indifférent ?

Donnez-vous avis dans le formulaire ci-dessous. Votre contribution servira à la rédaction d’un article.

A cette invitation, nous avons répondu positivement en envoyant à la rédaction de 20 Minutes la réflexion suivante:

"La question n'est pas de revenir à la situation d'avant 2016 mais de tenir compte, enfin, des réalités géo-historiques pour définir pour le Sud-Ouest, un ensemble "aquitain" centré sur Bordeaux à l'Ouest qui remet le Quercy (Lot + Tarn-et-Garonne) du bon côté et qui autorise la réunification de la Gascogne (Landes + Gers) et un ensemble "occitan" avec ses deux pôles de Toulouse et de Montpellier, du pays toulousain et les Comminges à l'Ouest (Haute-Garonne) jusqu'à la vallée du Rhône à l'Est, quitte à intégrer à cet ensemble le Rouergue (Aveyron) autrefois rattaché à Bordeaux avant 1789. L'enjeu est donc d'avoir le courage politique de descendre à l'échelle de la maille départementale pour faire une carte régionale digne de ce nom."

Pour traiter sérieusement notre affaire régionale il faut, en effet, la travailler sur l'établi de la carte départementale qui existe depuis 1790: cela va demander de recourir à une denrée rare, le courage politique. Et du courage politique, il en faudra pour traiter la question bretonne (Bretagne actuelle + Loire-Atlantique); la question du Valois (département de l'Oise qui veut son rattachement à l'Ile-de-France) ; la question du Dauphiné (faire revenir le département des Hautes-Alpes dans la région Rhône-Alpes); la question de la Savoie, du Maine ou du Berry (fusions de deux départements) ou du Limousin (fusion de trois départements) pour créer des pouvoirs territoriaux locaux plus forts dans le cadre actuel des grandes "régions" ou mieux: créer des régions qui correspondent à la réalité de ces territoires.

Le site de "20 Minutes" pose, enfin, la même question avec la néo-région dite "Grand- Est" qui est, aujourd'hui, en sursis avec la communauté unique "européenne" d'Alsace qui ne cesse de demander d'en sortir:

https://www.20minutes.fr/societe/4022946-20230210-grand-alsace-nouveau-hors-grande-region-diriez

Comme les Alsaciens ne cessent de réclamer, ils finiront par obtenir gain de cause: à n'en pas douter, le retour au statu quo ante de 2016 est au bout du chemin car il est peu probable que Lorrains et Champenois veuillent continuer à faire région commune après le retrait des encombrants Alsaciens. La question se pose enfin avec la néo-région "ARA" ou "l'Arvernorhodalpie" comme nous l'appelons joliment car quoi de commun entre le bocage du Bourbonnais à l'Ouest (Allier) et les vallées savoyardes des Alpes à l'Est?

La encore, la carte régionale des années 1960 malgré tous ses défauts était bien meilleure que celle de 2016 et ses soi-disant "grandes régions de taille européenne" (sic!) car l'idée de François Hollande de faire ces grandes régions en fusionnant les régions adjacentes méprise la géographie: c'était une médiocre idée politicienne pour éviter une guerre entre barons socialistes notamment sur fond de question bretonne et une erreur précipitée par une injonction comptable venue de la Commission européenne

Dans ce consternant concours de circonstances, un miracle s'est, cependant, produit: la réunification de notre Normandie.


 Pour la grande presse parisienne dite "nationale" il n'y a de régionalisme politique qu'en Bretagne, en Corse ou au Pays basque... C'est-à-dire le régionalisme qui fait boum et qui fait couler le sang des innocents!

Un régionalisme qui se confond pour le pire et rarement pour le meilleur avec un nationalisme séparatiste quitte à louvoyer idéologiquement d'un extrême à l'autre avec pour résultat, la destruction de tout débat public national sérieux sur l'idée régionale dans une France jacobine parisienne sinon coloniale vis-à-vis de ses provinces qui a toujours besoin d'un ennemi pour se justifier: ça tombe bien! Le poseur de bombes et noctambule de la nuit bleue corse, basque ou bretonne est l'idiot utile idéal!

Lire dans la Croix (10 février 2023 p.25) cet article édifiant sur le régionalisme identitaire breton: édifiant par tout ce que cet article oublie de nous dire...

"Malgré les errements au temps de l'Occupation": On aurait aimé en savoir davantage!

La Bretagne son identité La Croix page 25 le 9 Février 2023 le 10 Février 2023 001

Le régionalisme normand peut s'honorer de n'avoir pas de sang sur les mains.

MouvementdormantOriginale

Et même si l'on peut assurément discuter certains "errements" idéologiques dans la quête pour nous vaine de fonder l'identité normande- qui est, avant toute chose, un existentialisme plus personnel que communautaire- dans le rêve d'un ethno-type scandinave ou nordique néo-païen, le régionalisme normand lancé par le Mouvement Normand au début des années 1970 par le regretté Didier Patte n'a jamais souhaité l'indépendance de la Normandie, "terre de France et qui entend le rester".

Le régionalisme normand s'est mobilisé pour obtenir l'unité politique de la Normandie, chose enfin acquise depuis le 1er janvier 2016, et continue de se mobiliser pour une région authentiquement normande dans tous les aspects de la vie sociale, culturelle, économique, politique ou institutionnelle: c'est l'objectif sinon le combat que nous poursuivons ici même.

Le régionalisme normand propose la voie moyenne qui est celle d'une certaine sagesse entre la radicalité centralisatrice jacobine, d'une part, et la radicalité séparatiste nationalitaire revendiquée par certains régionalismes d'autre part: la sagesse d'une solution "girondine" qui n'a jamais vraiment été expérimentée depuis plus de deux cents ans. 

Comme d'habitude, les sages ne font pas de bruit et ça intéresse moins les journalistes de Paris ou d'ailleurs!

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