/https%3A%2F%2Fprofilepics.canalblog.com%2Fprofilepics%2F1%2F7%2F1799921.jpg)
Coopération Normandie-îles anglo-normandes: Fluctuat Nec Mergitur, dans le pragmatisme et l'amitié!
Malgré la tempête du Brexit, l'esnèque normande n'a pas chaviré. L'évidence des liens culturels, économiques et institutionnels privilégiés entre la Normandie continentale française et les îles anglo-normandes en raison d'une histoire séculaire commune n'a pas sombré dans les vagues du repli national jacobin français ou dans la houle du parlement de Westminster.
Cependant, le Brexit met à l'épreuve cette relation originale totalement normande qui permet un pont bien utile entre la France et le Royaume-uni: un monde normand "between" continue de s'insérer entre nos deux nations qui est comme le baromètre de la relation entre le Royaume-uni et l'Europe continentale.
Communiqué de la région Normandie (20 octobre 2022):
Sommet des Iles Anglo-Normandes / Normandie / Manche à Caen
Le sommet annuel des îles Anglo-Normandes / Normandie / Manche s’est tenu jeudi 20 octobre 2022 à l’Abbaye aux Dames à Caen. Hervé Morin, Président de la Région Normandie, Jean Morin, Président du Département de la Manche, Kristina Moore, Première Ministre de Jersey, Philip Ozouf, Ministre des affaires étrangères de Jersey, Jonathan Le Tocq, Ministre des affaires étrangères de Guernesey ont abordé des sujets stratégiques communs à ces territoires. Ils ont par ailleurs renouvelé la convention triennale de partenariat entre ces territoires.
« Outre notre proximité géographique, nous partageons non seulement une histoire et un patrimoine communs mais également des enjeux de développement similaires. Dès lors, nous avons souhaité formaliser notre relation institutionnelle, dans le cadre de nos compétences respectives, par la signature d’une convention de partenariat multipartite » a déclaré Hervé Morin, Président de la Région Normandie.
« Les bureaux de représentation situés en Normandie et dans les îles anglo-normandes ont permis la mise en œuvre d’échanges techniques fructueux dans de nombreux domaines. Avec cette nouvelle convention, nous allons amplifier nos actions de coopération », a déclaré, pour sa part, Jean Morin, Président du Département de la Manche.
Première femme élue au poste de Première Ministre à Jersey, Kristina Moore a indiqué, quant à elle, qu’elle « souhaitait développer et pérenniser les liens avec ses voisins français : cette relation est extrêmement importante, non seulement en raison de notre proximité géographique, mais aussi par des siècles de liens culturels, commerciaux, linguistiques, historiques et familiaux. »
Parmi les sujets stratégiques abordés figurent, les conséquences du Brexit et son impact sur la mobilité (passeports obligatoires), sur le commerce et la pêche ; les relations bilatérales générales en termes d'éducation, de culture, de sport et de commerce.
ACTIONS DE COOPERATION
Perturbées les années précédentes, les actions récurrentes de coopérations ont pu reprendre en 2022. La coopération culturelle ne cesse de s’étoffer grâce à la mise en oeuvre d’une Stratégie pour les Arts et la Culture à Jersey qui préconise notamment de renforcer les liens avec la France et la Normandie. Lors du Festival des Corn Riots à Jersey, un « village normand » a été constitué autour de commerçants normands et de Normandie Tourisme et avec le groupe dieppois « For the Hackers » et la fanfare granvillaise « L’Etoile Cirée ». La valorisation d'entreprises et de produits normands par le biais de la Boutique de la Maison de la Normandie et de la Manche à Jersey s’accroit et les marchés normands connaissent un joli succès à Jersey. La reprise des échanges scolaires et la volonté de développer des partenariats pérennes ont été affirmés, comme les perspectives de coopération sur le 80ème anniversaire du Débarquement en 2024 puis sur le Millénaire de Guillaume le Conquérant en 2027. Le Tour des Ports de la Manche a repris en 2022 avec une étape supplémentaire autour de l'île de Jersey. Jersey et Guernesey sont prévus dans les étapes de l’édition 2023.
PASSEPORTS
Depuis le 1er octobre 2021, un passeport est requis pour se rendre dans les îles Anglo-Normandes, même pour un séjour touristique de courte durée. Cette nouvelle obligation entraîne des conséquences sur la coopération (jumelages, rencontres entre professionnels, compétitions sportives…). La baisse du nombre de visiteurs français sur les îles Anglo-Normandes est conséquente. Jersey a enregistré une baisse de près de 70% sur les allers et retours journée de la clientèle en provenance de France sur la période janvier-juillet 2022 comparée à la même période en 2019. La compagnie Manche îles Express a observé une baisse significative de fréquentation, particulièrement sur les liaisons continent/îles.
Face à ce constat, les partenaires anglo-normands se sont engagés à travailler sur des solutions possibles concernant les passeports et des stages à Jersey.
Les partenaires souhaitent mettre en place une solution alternative aux passeports. Un courrier commun a été rédigé à l’occasion du sommet et va être adressé de la part des autorités de Jersey, de Guernesey, de la Région Normandie et du Département de la Manche aux gouvernements français et britannique.
PECHE
A la suite du Brexit voté le 23 juin 2016, l’Accord Commercial et de Coopération (ACC) conclu entre le Royaume-Uni et l'Union Européenne, le 24 décembre 2020, modifie les relations entre la France et les îles Anglo-Normandes concernant la pêche.
Pour Jersey, c’est la fin des Accords de la Baie de Granville et de son régime de gestion partagée. Les îles Anglo-Normandes ont le contrôle de leurs eaux territoriales. Ces changements ont amené les pêcheurs normands, bretons mais aussi jersiais à manifester pour leurs droits respectifs. Grâce à la reprise d'un dialogue direct entre les services, la situation conflictuelle a été réglée sur de nombreux points, montrant une volonté continue de bonne entente entre les partenaires.
Jersey a délivré 136 licences définitives dont 79 attribuées à des navires normands ; Guernesey, 41 licences dont 15 attribuées à des navires normands.
Lors de la réunion de Caen, les partenaires anglo-normands ont travaillé sur les suggestions des partenaires et représentants des pêcheurs français afin de limiter au maximum l'impact négatif pouvant découler de la mise en place de conditions de « l’ampleur et de la nature réelles de l’activité de pêche dont il peut être démontré qu’elle a été exercée au cours de la période débutant le 1er février 2017 et se terminant le 31 janvier 2020 ». La question des navires de remplacement a également été évoquée.
Les partenaires souhaitent la mise en place d’un espace commun qui permettrait de travailler à la préservation et l’exploitation de la ressource marine et dont serait issue la délivrance des licences des deux côtés.
DEBARQUE
Depuis le Brexit, de nombreux changements complexifient la débarque anglo-normande dans les ports de la Manche. Le Port de Diélette ne peut plus accueillir la débarque guernesiaise. Un accroissement important des procédures administratives pour les pêcheurs et exportateurs jersiais et guernesiais rend la débarque plus compliquée : certificat de capture, notification préalable, déclaration préalable à la débarque…
Un dossier de demande SIVEP (Service de contrôle sanitaire pour la débarque de produits vivants comme les moules et les huîtres) de Granville est en cours d’instruction auprès des services de l’État. L’absence actuelle de SIVEP engendre des problèmes importants pour les anglo-normands et des pertes de trafic pour le port de Granville.
Les participants de la réunion du 20 octobre à Caen se sont engagés à faire avancer le dossier du SIVEP de Granville.
Par ailleurs, ils demandent la suppression des horaires de débarque imposés aux pêcheurs anglo-normands depuis le 19 juillet 2022
Par ailleurs, le sommet s’est penché sur la prolifération des araignées de mer, en raison du changement climatique et du réchauffement des eaux. Cette prolifération met en péril la mytiliculture en Normandie comme à Jersey et menace également les stocks de homards et de crabes bruns.
Les participants au sommet vont co-financer une étude et amorcer un travail commun avec des experts des différents territoires afin de trouver des solutions locales à ce problème de prolifération des araignées.
D’autre part, sur les questions de submersion marine, la délégation a visité les canaux à houle actuellement en test à l’ESITC à Epron, puis la digue équipée des blocs en béton biosourcé du projet CHERLOC à Ouistreham.
Repères
Le terme générique d’îles Anglo-Normandes est davantage une indication géographique. Jersey et Guernesey, bailliages distincts, sont deux territoires juridiques indépendants avec leur propre gouvernement et leurs propres lois. Les deux bailliages de Jersey et de Guernesey (ce dernier comprend également les îles de Sercq et Aurigny) ne font ni partie du Royaume-Uni, ni de l'Union Européenne, ni de l'Espace Schengen. En revanche, les îles dépendent de la Couronne pour leurs relations internationales et leur défense. Même si elles ont des ministres des Affaires étrangères, elles ne peuvent conclure d’accords commerciaux avec des pays étrangers sans avoir reçu l’accord du Roi. Ces territoires comptent environ 170 000 habitants (103 000 à Jersey, 63 000 à Guernesey, 2 000 à Aurigny, 600 à Sercq).
Voir aussi:
Pour la première fois depuis le Brexit et le Covid, les gouvernements de Jersey et Guernesey ont été reçus au conseil régional de Normandie, à l’abbaye aux Dames de Caen (Calvados), jeudi 20 octobre 2022.
Au programme de la rencontre entre le conseil régional de Normandie et Jersey et Guernesey : la pêche, les passeports et une amitié renforcée ! Voici un résumé de ce sommet.
Des relations au beau fixe
L’abbaye aux Dames de Caen accueillait, jeudi 20 octobre, un sommet des îles anglo-normandes « empreint de confiance et de sincérité » . C’est la première fois que les gouvernements de Jersey et Guernesey retrouvaient la France après deux ans d’insularité forcée par le Covid.
Après un détour par Rennes, Philip Ozouf, nouveau ministre des affaires étrangères de Jersey, et Jonathan Le Tocq, son homologue de Guernesey, ont échangé avec Hervé Morin, président de Région, et Jean Morin, président du Département de la Manche. Les quatre ont le souci d’afficher une unité malmenée par le Brexit.
Vers une pêche harmonisée ?
Pendant deux ans, le feuilleton des licences de pêche a rendu pour le moins saumâtres (sic! on ne savait pas que la mer n'était pas assez salée!) les eaux de la baie de Granville. Il faut désormais rebâtir les fondations d’une entente cordiale autour de la pêche.
« Pour le moment, nous avons des licences mais qu’en sera-t-il pour les bateaux de remplacement, les points de débarque…, souligne Hervé Morin. Nous avons été prisonniers d’un modèle de dialogue entre le Royaume-Uni, Bruxelles et Paris. »
Renégocier à l’échelle régionale les bases d’un « code de la mer » dans la Manche entre Bretons, Normands et Anglo-Normands, telle est l’ambition. (Ndlr: référence au principe de "mer commune" des années 1849 et aux accords de la baie de Granville de l'an 2000.)
« Quelle pourrait être la pêche du futur sur le territoire ? demande Hervé Morin. Nous devons gérer conjointement la ressource halieutique. »
Exemple avec l’invasion de l’araignée de mer qui ne touche pas seulement les mytiliculteurs manchois mais aussi les pêcheurs jersiais. « Nous allons cofinancer une étude commune sur la gestion de l’araignée pour en tirer un modèle économique », annonce Hervé Morin.
Lire aussi : REPORTAGE. L’araignée de mer, très encombrant voisin des mytiliculteurs
Les points qui pêchent
Jean Morin le rappelle, sur le dossier pêche, tout n’est pas soldé : « Nous avons toujours la question de la mise en place du Service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (Sivep) à Granville, pour l’heure les Jersiais sont contraints de débarquer à Saint-Malo ce qui fait perdre 3 000 tonnes de fret à Granville. Nous devons aussi nous entendre sur les horaires de débarque, pour le moment fixées entre 8 h et 18 h, sans prise en compte des marées. »
(Ndlr: les technocrates de Bruxelles ne passent pas leurs vacances estivales à Granville...)
Pour accéder, comme souhaité, avant l’été 2023 à ce « gentlemen’s agreement » , il faudra se mettre autour de la table. Les Anglo-Normands se sentent plus affranchis de la tutelle londonienne – elle-même embourbée dans sa crise politique – pour leur diplomatie régionale. « Les solutions les plus durables sont trouvées quand les gens sont proches et le dialogue direct », note Jonathan Le Tocq.
(Ndlr: et aussi quand un australien qui se dit pêcheur jersiais cessera ses boniments...)
La question des passeports
« Les liaisons ferries vers les Anglo-Normandes accusent une baisse de 60 % de fréquentation du fait de l’obligation du passeport », rappelle Jean Morin. Le tourisme accuse le coup sans cette clientèle française. La Région, le Département de la Manche et les gouvernements des bailliages de Jersey, Guernesey, Aurigny et Sercq vont envoyer un courrier à leurs ambassadeurs et gouvernements pour alerter sur ce risque économique.
« Nous devons trouver des solutions pragmatiques », souligne Philip Ozouf. Parmi les pistes à l’étude : une dérogation de passeport pour les séjours à la journée ou sur un week-end.
Un renouveau culturel
Les liens culturels ressortent renforcés de ce sommet avec en point de mire des célébrations conjointes, en 2027, du millénaire de la naissance de Guillaume Le Conquérant.
/http%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F38%2F76%2F1718906%2F134486338_o.jpeg)
/http%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F28%2F05%2F1718906%2F134480165_o.png)
/http%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F39%2F31%2F1718906%2F134468001_o.png)
/http%3A%2F%2Fstorage.canalblog.com%2F51%2F64%2F1718906%2F134450975_o.jpg)