Billet de Florestan:

Nous vivons une époque étrange: sur le vaste estran libéré par le reflux des hautes eaux de la civilisation judéo-chrétienne et du catholicisme romain, reflux diagnostiqué par le philosophe normand Marcel Gauchet dans un essai qui fit date ("le désenchantement du monde" 1985) prospèrent, autour de flaques à l'eau idéologiquement saumâtre trouant le sable encore mouillé, des manifestations collectives humaines bizarres qui semblent faire renaître des pratiques régressives, archaïques et superstitieuses que l'on croyait définitivement oubliées dans un passé lointain forcément obscur et médiéval...

Compte tenu de ce que la recherche historique nous apprend de notre Normandie médiévale, il n'est pas certain que les temps dits "obscurs" soient ceux auxquels on pourrait croire d'emblée!

En effet, brûler en place publique une effigie humaine était chose courante non pas à l'époque de Guillaume Le Conquérant mais aux XVI et XVIIe siècles faute de pouvoir chatier et condamner à mort la personne humaine physique: les autorités politiques et religieuses de l'époque y voyaient un moyen d'édifier la conscience collective... Dans le même genre, le pilori, les "fourches patibulaires" permettaient d'exposer vivants les malheureux condamnés à la haine collective tandis qu'au gibet dansaient les corps suppliciés des condamnés à mort qui achevaient ainsi de pourrir à l'air.

Ces horreurs se voulaient moralement exemplaires à la demande des autorités notamment religieuses lorsqu'il s'agissait de brûler en effigie une sorcière faute de pouvoir carboniser une vraie bonne femme! On dira la même chose d'un Huguenot, Parpaillot ou "mal sentant de la foi" en terre catholique sachant qu'en terre protestante, c'était le catholique qui pouvait craindre le sort réservé aux sorcières, unaniment pourchassées dans l'Europe d'alors...

Il faudra attendre la seconde moitié du XVIIIe siècle avec les réflexions des philosophes et du grand juriste italien Beccaria pour que l'on cesse de confondre une condamnation avec un châtiment.

Exécution en effigie — Wikipédia (wikipedia.org)

Mais l'archaïque passion supertitieuse de purifier par le feu ce qui ne vous revient pas n'est pas morte pour autant: elle réapparaît lors des moments de crise. Pendant la révolution française bien entendu mais aussi plus tard au XXè siècle manipulée par la propagande des grands totalitarismes d'extrême droite et d'extrême gauche: on se souvient des terrifiants "autodafés" de livres commis par les Nazis dans toutes les bibliothèques d'Allemagne ou de ces tristes carnavals organisés par les gardes rouges Chinois... Ou plus récemment ces manifestations violentes anti-occidentales organisées régulièrement par nos amis fascistes verts en Iran ou dans d'autres pays musulmans...

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Et cela semble revenir aujourd'hui en nos temps contemporains finalement plus obscurs que ce beau Moyen-âge des XII et XIIIe siècles!

A l'avenant: au Canada, retour des autodafés de livres eh oui! Avec une gauche progressiste "woke" dans le rôle de l'incendiaire nazi!

Cancel culture : au Canada, des livres brûlés au nom de l’« inclusivité » - Le Point

Ou plus près de nous, sur la plage de Courseulles-sur-Mer:

Dans le cadre symboliquement incertain et peu maîtrisé de ce carnaval d'Halloween qui, culturellement, n'est pas le nôtre, le mannequin d'une sorcière a été brûlé devant les enfants...

Une sorcière brûlée sur la plage de Courseulles-sur-Mer | Liberté Caen (actu.fr)

Une sorcière brûlée sur la plage de Courseulles-sur-Mer

Un bûcher et la foule pour voir brûler la sorcière Cornélia, c'était samedi 30 octobre 2021 en fin de journée sur la plage de Courseulles-sur-Mer.

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Après avoir traversé la ville sur un chariot, la sorcière Cornélia a brûlé sur la plage de Courseulles-sur-Mer. La foule, contenue par les bénévoles, est dense et ravie. (©Liberté Caen)

Sorcières, fantômes, vampires, squelettes et loups-garous ont défilé à travers la ville, derrière la terrifiante sorcière Cornélia, samedi 30 octobre 2021 à Courseulles-sur-Mer. Le défilé, parti du marché couvert, a rejoint la plage où un bûcher a été installé pour brûler la sorcière Cornélia. 

Une tradition venue d’Irlande

Les ateliers et animations organisés par le service animations de la ville, le centre de loisirs, le Paradis des Enfants, l’association culturelle de Courseulles (ACC), le Centre Juno Beach et Courseulles équitation ont rencontré un vif succès après ces temps de pandémie.

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La tradition venue d’Irlande a drainé beaucoup de monde, jusqu’à la touche finale : la dégustation de soupe à la citrouille.